Euforia, loin de rendre euphorique

Après Miele, réalisé en 2013, la réalisatrice italienne Valeria Golino s’offre une place à Cannes avec Euforia. Sélectionné dans la catégorie ‘‘Un certain regard’’, ce drame familial, ou plutôt fraternel, manque de conviction.

Deux frères, deux mondes. Matteo, entrepreneur extravagant et détenteur d’un gigantesque appartement romain avec vue sur le monument à Victor-Emmanuel II, symbole de ses moyens. Et Ettore, professeur de collège habitant dans sa ville natale, en province, se revendiquant ‘‘normal’’ face à son frère. Quand le premier apprend que son grand frère est mourant, celui-ci lui propose de poser ses valises à Rome. Les deux hommes se rapprochent, s’aiment, se détestent, se mentent, leurs univers s’entrechoquent….

Deux mondes connus

Malgré leur lien de sang, les deux protagonistes sont en constante opposition. Matteo est beau, riche, audacieux et extravagant (autant qu’extraverti), tandis que l’autre, Ettore, est banal, effacé, nostalgique et prudent. Ce contraste trouve sa source dans des clichés récurrents. L’urbain est ouvert et moderne, le provincial est fermé et rustique. C’est d’ailleurs nettement représenté dans leurs modes de pensées. L’acceptation de l’homosexualité de Matteo, par Ettore et par lui-même, est une des trames du film. Cet élément est maladroitement utilisé par la réalisatrice qui l’utilise principalement pour signifier l’ ‘‘anormalité’’ de Matteo aux yeux de son frère.

Mais l’autre marque de différence entre les deux frères est aussi la maladie. Celle-ci est savamment utilisée, Matteo est en bonne santé malgré un train de vie exigeant. Tandis qu’Ettore subit sa maladie malgré sa vie saine. La tumeur est une injustice sociale entre une classe privilégiée et une classe populaire qui subit tous les malheurs de ce monde.

Présente au début du long métrage, la famille s’efface au fur et à mesure que l’histoire avance. Face à certaines composantes sans intérêt scénaristique, la complexité des relations entre les différents membres de la famille (Mère/Fils, Mari/Femme, Père/Fils) est laissée pour compte. Nous survolons ces dernières pour se concentrer uniquement sur cette fraternité, qui a certains moments s’essouffle un peu.

 Une réalisatrice qui se cherche

Pour autant, le film est prometteur pour la réalisatrice. La construction un peu bancale n’efface en rien un scénario intéressant et certaines prises de vue très esthétiques. Dès le début du long métrage, la couleur est annoncée avec une séquence contemplative où le corps se mélange à la lumière. Mis à part lors d’une séquence de projection, ce type de scène est absente tout le reste du film. En oscillant également avec des séquences plus dramatiques et d’autres à la limite du documentaire, la réalisatrice est en recherche d’un style. Ces quelques fulgurances de réalisation rendent le long métrage inégal et sa longueur n’arrange rien.

Certaines séquences n’ont pas leur place au sein du film et cassent son rythme ce qui provoque parfois un profond ennui. Passer d’un style à l’autre ne vient pas en aide à la crédibilité, certaines scènes peinent à convaincre. Malgré une intrigue intéressante sur le papier, aucun moment réellement fort et émouvant ne se fait remarquer ce qui rend ce deuxième film de Valeria Golino fade.

Loin d’être mauvais, ce long métrage se contente d’être moyen. La crédibilité et la conviction ne sont pas toujours au rendez-vous et sa longueur le rend difficilement appréciable.

 

 

Robin Grez