The Substance de Coralie Fargeat, une satire sur les normes de beauté féminine ?

 

The Substance (Film, 2024) — CinéSérie

Coralie Fargeat, réalisatrice française, obtient le prix du scénario lors de cette 77ème édition du festival de Cannes pour le film The Substance. 

The Substance est un film d’horreur corporelle extrême qui traite de façon brutale les critères de beauté imposés aux femmes, la dévalorisation des femmes dans une société obsédée par l’apparence où l’âgisme (l’ensemble des stéréotypes et des discriminations liées à l’âge) est l’une des formes d’exclusion sociale les plus cruelles pour ces dernières.

Demi Moore incarne Elisabeth Sparkle, une ancienne célébrité hollywoodienne reconvertie en présentatrice et professeur de fitness à la télévision. Le jour de ses 50 ans, elle surprend involontairement une conversation de son patron au téléphone qui l’humilie et cherche à la remplacer par une jeune femme ayant la moitié de son âge. Noémie Fargeat explore l’inutilité et le ressentiment que ressent Elisabeth, conditionnée à se mesurer par sa désirabilité sexuelle. Elle tombe ensuite sur un jeune homme pimpant lui présentant une drôle de drogue expérimentale censée lui redonner sa jeunesse. Une semaine sur deux, elle aura le droit à la “meilleure version d’elle-même” : une version plus jeune et plus belle qu’elle nommera Sue, interprétée par Margaret Qualley. Alors qu’il est clairement précisé que la prise de la drogue ne crée pas deux personnes distinctes, mais que c’est toujours la même personne qui subit ses effets, un fort trouble de dépersonnalisation /déréalisation (expérience où une personne se sent détachée ou déconnectée de son propre corps, de ses pensées ou de sa réalité, comme si elle observait sa propre existence de l’extérieur) touchera Elisabeth et Sue tentera de prendre le dessus. Rappelant The Fly de Cronenberg, où l’horreur physique atteindra son paroxysme, avec des effets spéciaux et des talents de maquillage impressionnants, la dernière partie amènera à un climax, gore, violent, grotesque et captivant.

Le film est une exploration brute de la manière dont la société et les femmes maltraitent le corps féminin. Les normes de beauté impitoyables et destructrices imposées aux femmes depuis des siècles, sont perpétrées notamment par les femmes qui les ont elles-mêmes internalisé.

Porté par des actrices aux performances fortes, The Substance est une attaque féministe sur le narcissisme, les obsessions des êtres humains pour la beauté et les privilèges qui en découlent. Le film ne réinvente pas le genre, mais le spectateur est entraîné dans un tourbillon mêlant critique sociale et horreur pour commenter la brutalité d’une industrie qui depuis toujours promeut le self hatred: la haine de soi.

Les premières critiques sont partagées entre ceux qui affirment que le film est transgressif, féministe, et une satire des critères de beauté saugrenus imposés aux femmes, d’autres au contraire le qualifient comme anti-féministe, ayant une vision faussée de l’importance que les femmes accordent à leurs physiques où à la façon dont elles sont perçues par la société et les hommes.

Entre évanouissements, vomissements, toux, et départs précipités lors des avant-premières, The Substance offre sans aucun doute une expérience cinématographique morbide, provocante et inoubliable.

En salles le 20 septembre 2024.

Spectateurs ! : L’Hymne Cinéphile d’Arnaud Desplechin

Arnaud Desplechin’s ‘spectateurs!,’ Starring ‘anatomy Of A Fall’ Child ...

Avec « Spectateurs ! », Arnaud Desplechin rend hommage au 7ème art et aux salles obscures. Ce documentaire-fiction suit le parcours initiatique de Paul Dédalus, jeune spectateur passionné, tout en explorant les mystères et les magies du cinéma à travers les âges, mêlant souvenirs, enquêtes et réflexions sur l’art cinématographique.

Synopsis

Qu’est-ce que c’est, aller au cinéma ? Pourquoi y allons-nous depuis plus de 100 ans ? Tel un roman d’apprentissage, « Spectateurs » suit le parcours de Paul Dédalus, explorant les salles obscures et les théories essentielles du cinéma. Le réalisateur Arnaud Desplechin nous invite à réfléchir sur notre passion pour le septième art et à découvrir comment la fabrique d’un immense réalisateur s’est opérée.

Un Film pour les Passionnés du Cinéma

« Spectateurs » se présente comme un documentaire, mais il va au-delà. Il évoque les films qui ont marqué la vie d’Arnaud Desplechin, déroulant les fils de sa propre histoire cinématographique mais aussi  les théories essentielles du cinéma, revisitant les films marquants qui ont jalonné son parcours de cinéphile. Un véritable torrent d’images et de références, ponctué de près d’une cinquantaine d’extraits cultes.

Un Film Charnière, Entre Transmission et Introspection

« Spectateurs ! » se veut un espace d’enseignement et de transmission pour tous les amoureux du 7ème art, novices ou experts. Desplechin y partage sa fabrique de cinéaste, mêlant l’intime et l’universel avec une structure à la fois linéaire et kaléidoscopique.

À l’instar du récent « The Fabelmans » de Steven Spielberg, le film emprunte les codes du « roman d’apprentissage » pour explorer les origines d’une vocation artistique. Une ode poétique et érudite aux pouvoirs du cinéma, à mi-chemin entre le documentaire et la fiction.

Ce n’est pas seulement un film, mais un espace d’enseignement et de transmission pour tous les apprentis et experts en cinéma.

La Petite Histoire d’un Spectateur et la Grande Histoire du Cinéma

La structure du film est à la fois linéaire et brouillonne. D’un côté, nous remontons à l’invention de la technique cinématographique il y a plus d’un siècle, jusqu’à la réalisation d’un film contemporain. De l’autre, Desplechin nous parle de sa grand-mère, d’un cours théorique, puis d’un ami américain. Les sujets se succèdent, tissant une toile complexe où se mêlent les émotions et les réflexions.

Attention : Il ce peux que vous décrochiez si vous n’êtes pas passionnée de cinéma.

 

Emilia Perez : Un Film Inclassable et Audacieux au Festival de Cannes 2024

The gonzo trans Mexican drug lord musical 'Emilia Perez' lights up Cannes
World News, Selena Gomez, Entertainment

Emilia Perez, le dernier film de Jacques Audiard, s’est imposé comme le grand gagnant du 77e Festival de Cannes en remportant pas un mais deux prix majeurs. Mais qu’en penser réellement ? Voici un aperçu de ce film audacieux qui défie les conventions.

Synopsis :

Rita, avocate surqualifiée et surexploitée, travaille pour un grand cabinet d’avocats plus intéressé par le blanchiment d’argent que par la justice. Cependant, une opportunité inattendue se présente à elle : aider Manitas, le chef de cartel, à se retirer des affaires et à réaliser son plan secret de devenir enfin la femme qu’il a toujours rêvé d’être.

Un Scénario original :

Le scénario est tout simplement dingue. Jacques Audiard a osé s’aventurer dans un territoire inexploré. Cette prémisse audacieuse semblait risquée sur le papier, mais Audiard fascine dès les premières scènes par son travail de funambule, toujours à la limite du ridicule.

Imaginez : un film situé dans un Mexique machiste, transformé en comédie musicale chantée en espagnol, racontant l’histoire d’un chef de cartel sanguinaire obsédé par l’idée de changer de sexe. C’est un pari risqué, mais Audiard y est finalement arrivé.

Le Lâcher-prise Inhabituel :

Emilia Perez exige un lâcher-prise inhabituel de la part du spectateur. C’est là toute sa force : on peut le juger courageux ou suicidaire, mais une chose est sûre, on n’oubliera pas cette séance de sitôt. Le film nous confronte à l’inattendu, à l’inconfort, et c’est précisément ce qui le rend mémorable.

La Figure Virile et la Comédie Musicale :

Le personnage de Manitas, le trafiquant, brise les clichés du film de cartel. Sa virilité et sa brutalité se transforment lorsqu’il se met à chanter son désespoir d’être né homme.

Porté par des performances remarquables, notamment celle de l’actrice transgenre espagnole Karla Sofía Gascón dans le rôle-titre, Emilia Perez séduit par sa mise en scène virtuose et sa bande originale percutante signée Camille et Clément Ducol. Si certaines séquences chantées manquent parfois de puissance, on est prêt à pardonner ces imperfections face au plaisir que procure ce film inclassable, véritable ovni du cinéma qui nous rappelle que l’identité est complexe et que les frontières entre masculin et féminin sont souvent floues.

Avec Emilia Perez, Jacques Audiard confirme sa capacité à renouveler son cinéma sans perdre son inventivité et son goût du polar noir.

Sortie en France :

Les cinéphiles français pourront découvrir Emilia Perez au cinéma à partir du 28 août. Préparez-vous à une expérience cinématographique unique, un OVNI du septième art qui ne ressemble à rien de ce que vous avez vu auparavant

 

Conférence de presse du Jury des Longs Métrages au Festival de Cannes 2024

Conférence de presse du Jury des Longs Métrages – Clôture 2024 © Amandine Goetz / FDC

Une semaine après la clôture du 77ème Festival de Cannes, revenons sur ce moment privilégié où les membres du jury ont pu répondre aux questions des journalistes lors de la conférence de presse suivant la cérémonie de clôture.

Une expérience inoubliable pour le jury

Greta Gerwig, présidente du jury, a décrit cette expérience comme un « rêve » : « Passer ces journées à regarder des films, à en discuter avec mes collègues du jury que je respecte tellement… J’ai changé à tout jamais en tant que réalisatrice. Nous avons vu 22 films, chaque fois c’était un cadeau. »

Les autres membres ont partagé cet enthousiasme. Eva Green a évoqué « une bulle magique », tandis que Lily Gladstone a souligné « le respect mutuel » au sein du jury, même en cas de désaccord. « Je suis devenue une meilleure spectatrice, » a-t-elle ajouté.

Omar Sy a insisté sur « la joie d’avoir partagé ce moment, de parler de cinéma dans l’écoute et le respect. » « Ma relation avec le cinéma a changé, » a-t-il confié, ému.

Des discussions enrichissantes

Tous ont salué la qualité des échanges. « Les discussions étaient très épanouissantes et respectueuses, » selon Nadine Labaki. « C’est surprenant de voir à quel point notre perception peut évoluer au contact des autres. »

Hirokazu Kore-eda a souligné « l’occasion rare d’être entouré de personnes que l’on peut écouter (…) et d’apprendre d’autrui, l’un des plus grands cadeaux. »

Omar Sy de son côté à souligné l’importance d’écouter et d’échanger, même lorsque les opinions divergent. « J’ai appris énormément pendant ce festival » à t-il ajouter.

Plus généralement, cette expérience a été un voyage au-delà de leurs attentes pour tous les jurés. Ils ont pu écouter et apprendre les uns des autres, et le sentiment d’échange était crucial. Le cinéma a pris une nouvelle dimension pour eux, et ils ont gagné en connaissance et en humilité.

Le prix d’interprétation féminine collectif expliqué

Le jury a décerné le prix d’interprétation féminine aux femmes du casting d’Emilia Perez. Ce choix a marqué un changement significatif, puisque c’est la première fois qu’une femme transgenre remporte ce prix.

Interrogée, Greta Gerwig a expliqué : « Nous avons eu l’impression que les séparer aurait rompu la magie qu’elles avaient créée ensemble. C’est quelque chose que nous voulions souligner. » Un hommage rendu au jeu d’ensemble transcendant de ces actrices.

Pourquoi un prix spécial pour Rasoulof ?

Concernant le prix spécial attribué au film iranien Les Graines du Figuier Sauvage, la présidente a déclaré : « C’est un film remarquable. Nous avons voulu rendre hommage à la bravoure qu’il a fallu pour le faire, souligner le sacrifice. Pour réaliser ce genre de film, il faut payer le prix fort. »

La justification du choix d’Anora pour la Palme d’or

Quant au sacre d’Anora de Sean Baker, Gerwig a expliqué : « Nous avons été émus par des formes rappelant des structures classiques, mais aussi par des éléments inattendus (…) Collectivement, nous avons trouvé un équilibre dans nos choix, en tenant compte de l’avis de chacun. Les discussions ont été riches, et la sélection a été le fruit d’une collaboration entre tous les jurés. »

« Anora » : Un Film Original pour la Palme d’Or

Alex Coco, Mikey Madison, Sean Baker, Samantha Quan and Vache Tovmasyan avec la Palme d'or reçue par le film « Anora ».
© JP PARIENTE/SIPA / SIPA / JP PARIENTE/SIPA

« Anora », le film de Sean Baker, a remporté la prestigieuse Palme d’or au Festival de Cannes 2024. Ce long-métrage audacieux suit l’histoire d’Ani, une strip-teaseuse new-yorkaise, et du jeune fils d’un oligarque russe avec lequel elle se marie sur un coup de tête à Las Vegas.

Synopsis : Un conte de fées aux rebondissements tragiques

Anora, surnommée « Ani », est une strip-teaseuse. Sa vie bascule lorsqu’elle rencontre le fils d’un oligarque russe. Bien que débutant comme un conte de fées, le film prend rapidement une tournure sombre et bouleversante mêlant drame et tragédie . Il explore sans détour les dynamiques de pouvoir inhérentes aux différences de classes sociales et dénonce l’absence de responsabilité des élites riches se croyant tout permis

Impressions générales :

Une héroïne forte au cœur d’un monde corrompu

Le point fort du film réside dans son héroïne Anora/Ani, interprétée de manière convaincante. Loin d’être une victime passive, elle tient tête et ridiculise ce monde d’hommes corrompus par l’argent, apportant une perspective rafraîchissante.

A travers son personnage, ont explore les dynamiques de pouvoir entre les riches et les autres. « Anora » dépeint de manière saisissante comment les élites se divertissent aux dépens des plus vulnérables. Il met en lumière l’absence de responsabilité des fils de riches et la naïveté des jeunes générations face à ces réalités.

Un rythme haletant et des thèmes controversés

Avec ses scènes ultra rythmées sur 2h18, « Anora » ne laisse pas le temps à l’ennui. Il aborde également des sujets tabous comme la prostitution et le striptease, dans un mélange de suspense et de film policier d’action.

Point négatif : Ivan, une caricature du riche oisif ?

Le personnage d’Ivan, bien que divertissant, est trop caricatural. Entre ses soirées alcoolisées, ses jeux vidéo et ses aventures amoureuses, il incarne une vision simpliste des privilégiés. Ses relations superficielles contrastent avec celles de ses amis qui travaillent dur pour joindre les deux bouts.

Cependant, même si le personnage d’Ivan, semble parfois trop caricatural dans sa représentation du riche oisif et dépravé, cela n’enlève rien à la puissance du message délivré par le film.

Le film « Anora » sortira en France grâce au distributeur « Le Pacte », mais la date précise reste encore à déterminer.

 

Grand Prix : All We Imagine As Light, une ode à la féminité contre la structure sociale patriarcale indienne

Payal Kapadia's 'All We Imagine As Light' to release in theatres soon - India Today

“S’il vous plaît, n’attendez pas 30 ans pour avoir un autre film indien à Cannes” – Payal Kapadia

La réalisatrice indienne Payal Kapadia a remporté le prestigieux Grand Prix du festival de Cannes, avec son film All We Imagine as Light. Ce long métrage devient ainsi le premier film indien en 30 ans à remporter ce prix, et Kapadia est la première réalisatrice indienne à concourir dans la compétition principale de Cannes depuis le film Swaham de Shaji N Karun en 1994.

All We Imagine As Light de Payal Kapadia, un long métrage malayalam-hindi transcende les limites traditionnelles du cinéma narratif pour offrir une expérience intime et méditative sur la vie de femmes indiennes. All We Imagine as Light, suit trois infirmières, Prabha (Kani Kusruti), une infirmière, qui reçoit un cadeau inattendu de son ex-mari de longue date qui bouleverse sa vie. Anu (Divya Prabha) sa colocataire, qui vit en parallèle une relation amoureuse avec un homme musulman. Dans leurs hôpital, leur collègue Parvaty (Chhaya Kadam) est une infirmière veuve d’un certain âge, qui a des problèmes avec une société de construction voulant l’expulser de son logement. Prabha et Anu sont originaires du sud de l’Inde et Anu ne parle pas le hindi, la langue de Mumbai et compte énormément sur Prabha pour faire le lien entre les deux cultures. Elles entretiennent entre elles des liens très forts, parfois presque maternels, illustrant la profondeur des relations interpersonnelles dans ce film et qui sont particulièrement touchantes.

Par les performances émouvantes et poignantes de Kani Kusruti, Divya Prabha, et Chhaya Kadam, le film est une exploration délicate des désirs et des insécurités de ses personnages féminins, Kapadia prend soin de capturer chaque émotion sur leurs visages. Par son rythme lent et mélancolique, par son exploration du détachement urbain et par le scénario, la réalisatrice, met en lumière les réalités, rêves, conflits intérieurs et désirs, de ces femmes, créant des conversations qui résonnent profondément.

Kapadia déploie une technique remarquable en ouvrant le film avec une série de voix désincarnées méditant sur la vie urbaine et le sentiment d’être loin de chez soi que beaucoup d’indiens ressentent. Cette authenticité se poursuit tout au long du film, où les vies des personnages ne semblent jamais fabriquées pour servir un narratif simpliste.

All We Imagine As Light est une belle ode à la féminité et un manifeste contre la structure sociale patriarcale de l’Inde. La touche tendre de Kapadia assure que les idées sociopolitiques du film sont vues à travers le prisme de personnages apportant leurs angoisses, illustrant les affections perdues et retrouvées. Le film intègre les dynamiques religieuses tumultueuses entre les communautés hindoues et musulmanes, ainsi que les défis du développement urbain. Kapadia aborde ces thèmes avec subtilité, permettant au spectateur de s’acclimater progressivement au poids des attentes sociales.

La réalisation de Kapadia se distingue par une approche modeste et authentique. Chaque image est magnifiquement capturée, utilisant la lumière naturelle et une palette de couleurs qui rendent hommage à la beauté de Mumbai. Les scènes, qu’elles soient en ville ou au bord de la mer, ensoleillées ou pluvieuses, sont filmées de telle sorte que le spectateur n’a jamais l’impression d’assister à une démonstration cinématographique, mais plutôt de vivre des moments doux, intimes et réels.

Contrairement aux récits où les personnages fuient la campagne pour se réaliser en ville, ici, la ville devient une force répressive, enfermant les femmes dans des rôles limités. Leur liberté ne se trouve qu’au bord de la mer, dans le sud de l’Inde, un espace où elles peuvent respirer, aimer et être appréciées pour ce qu’elles sont. En plus de l’amour, Kapadia montre que l’amitié et la sororité peuvent nous éloigner de la solitude.

Il est important de noter que Kapadia, dont le documentaire A Night of Knowing Nothing explorait déjà les tensions politiques et sociales en Inde, continue à tisser des commentaires subtils mais poignants sur la condition des femmes dans un pays en proie à des défis socio-politiques complexes. Félicitée par le premier ministre indien issu du parti d’extrême droite le BJP, Narendra Modi, pour son Grand Prix, elle a pourtant fait l’objet en 2015 de mesures disciplinaires pour avoir protesté contre la nomination de Gajendra Chauhan du BJP au poste de président de la Film and Television Institute of India (FTII). Elle a perdu sa bourse et fait toujours face au procès.

Son engagement à travers le cinéma pour des causes sociales et politiques donne à All We Imagine As Light une profondeur supplémentaire, rendant hommage à la résilience et à la quête de liberté des femmes indiennes face aux structures patriarcales et aux tensions religieuses.

En salles dès le 2 octobre 2024.

Conférence de Presse du « Comte de Monte-Cristo » : Une Ambition Cinématographique Révélée

 

La belle complicité entre Anaïs Demoustier et Pierre Niney © Pierre Germay
La belle complicité entre Anaïs Demoustier et Pierre Niney © Pierre Germay

 

Après l’avant-première, la conférence de presse du film « Le Comte de Monte-Cristo » a réuni l’équipe au grand complet. Ce moment privilégié a permis de découvrir les coulisses de ce projet ambitieux. Voici les points forts de cette rencontre avec les créateurs et les acteurs du film.

Un Projet Né d’un Rêve Inconscient et d’une Envie de Grandeur

Les scénaristes et réalisateurs ont expliqué ce qui les a poussés à revisiter ce monument de la littérature française. L’idée de réaliser « Le Comte de Monte-Cristo » est née d’un rêve presque inconscient et d’une envie de créer un grand film, une œuvre épique qui marquerait les esprits. Cette ambition est perceptible dans chaque aspect de leur travail.

La Rédemption au Cœur du Film

La thématique de la rédemption est le fer de lance de cette adaptation. Les réalisateurs ont souligné l’importance des rôles féminins, notamment celui de Haydée, qui incarne une volonté d’émancipation de l’emprise du Comte de Monte-Cristo. Ce choix narratif modernise l’histoire en mettant en avant des figures féminines fortes et déterminées.

Un Acteur Italien pour l’Abbé Faria

Le choix d’un acteur italien pour incarner l’abbé Faria a intrigué les journalistes. Les réalisateurs ont expliqué que cette décision visait à apporter une authenticité et une profondeur supplémentaires au personnage, soulignant l’importance de la diversité culturelle dans le film.

Pierre Niney : Entre Défi et Passion

Pour Pierre Niney, jouer un grand héros de la littérature française a été un défi à la fois passionnant et intimidant. À ce moment de sa carrière, incarner Edmond Dantès représentait une opportunité unique. Il a préparé ce rôle avec une rigueur extrême, s’immergeant dans des entraînements d’escrime, d’équitation et d’apnée, s’entraînant avec le champion du monde d’apnée, qui détient un record de 11 minutes et 30 secondes sous l’eau. Niney a tenté de ne pas trop penser à la pression liée à ce rôle iconique, préférant se concentrer sur l’aspect philosophique et moderne du personnage.

Les Défis des Scénaristes : Faire des Choix Audacieux

L’un des plus grands défis pour les scénaristes a été de faire des choix narratifs audacieux sans se laisser intimider par les nombreuses adaptations existantes. Leur objectif était de créer une version unique et contemporaine de l’histoire, en s’abstenant de regarder les versions précédentes pour ne pas être influencés ou intimidés.

Un Nouveau Regard sur les Méchants de Monte-Cristo

Les partitions des trois antagonistes ont été repensées de manière significative pour cette adaptation. Cette réécriture a permis d’explorer de nouvelles dimensions des personnages et de rendre leur présence à l’écran plus intense et captivante.

Une Vengeance Orchestrée avec Précision

Un ajout notable dans le film est l’utilisation réelle d’un masque par Monte-Cristo, symbolisant son plan de vengeance méticuleusement orchestré. Les répétitions avec Haydée montrent comment chaque étape de sa vengeance est soigneusement préparée. Pierre Niney a également subi 150 heures de maquillage pour transformer son apparence, renforçant l’aspect théâtral et mystérieux de son personnage.

 

Leçon de maître de Georges Lucas : Les points clés à retenir

Cannes 2024: George Lucas reçoit la Palme d'or d'honneur, "Je voulais ...

Georges Lucas, inviter à recevoir la palme d’Honneur du festival de cannes cet année, nous a aussi fait le plaisir de venir tenir 1h30 de masterclass dans la salle Debussy qui était plus que bonder pour l’évènement. Mais que retenir de cette Masterclass ?

L’importance qu’à Cannes pour lui :

En effet, Lucas est venu pour la première fois à Cannes, en 1971, pour son film de science-fiction expérimental THX 1138. Ce fut un échec au box-office et le studio Warner refusa de payer son voyage en France pour le festival. Lucas s’est débrouillé pour débarquer sur la Côte d’Azur “sous une pluie de dingues”. “Nous avons pu voir le film. Nous nous sommes faufilés. Nous n’avions pas de billets. Nous n’avions rien. Nous sommes simplement entrés”, se souvient-il. Interrogé des décennies plus tard pour savoir pourquoi il ne s’était pas présenté à la conférence de presse du film, il a répondu : “Je ne savais pas qu’il y en avait une…”

L’importance de l’histoire et des personnages

Pour Georges Lucas, l’histoire est l’élément central de tout film. Il a souligné l’importance de créer des personnages forts et attachants auxquels le public peut s’identifier. Il a également évoqué son approche de la narration, expliquant comment il utilise des structures mythologiques et des archétypes pour créer des récits intemporels.

L’innovation technologique au service de la vision

Lucas est un pionnier de l’innovation technologique dans le cinéma. Il a discuté de son utilisation révolutionnaire d’effets spéciaux dans Star Wars, et comment il a repoussé les limites de ce qui était possible à l’époque. Cependant, il a toujours insisté sur le fait que la technologie doit être au service de la vision du réalisateur, et non l’inverse.

Le pouvoir du cinéma pour inspirer et divertir

Lucas est un fervent partisan du pouvoir du cinéma pour inspirer et divertir. Il a parlé de l’impact que les films ont eu sur sa propre vie, et de son espoir que ses films puissent continuer à inspirer et à divertir les générations futures.

Des conseils pour les aspirants cinéastes

Lucas a conclu sa masterclass en offrant quelques conseils aux aspirants cinéastes. Il les a encouragés à suivre leur passion, à travailler dur et à ne jamais abandonner leurs rêves.

En plus de ces conseils fort, George Lucas a parlé de ses influences, notamment Akira Kurosawa et Joseph Campbell. Il a aussi discuté des défis de la réalisation de la trilogie originale de Star Wars et a partagé ses réflexions sur l’état actuel de l’industrie cinématographique.

 

Niki : le film sous côté de la sélection un certain regard ?

Niki, premier long-métrage de la réalisatrice Céline Sallette, s’est glissé dans la sélection Un Certain Regard du Festival de Cannes 2024, loin des projecteurs des films en lice pour la Palme d’Or. Pourtant, cette œuvre méconnue mérite le détour pour son sujet poignant et son interprétation magistrale.

Plongez dans l’univers de Niki de Saint Phalle

Le film retrace la vie tumultueuse de Niki de Saint Phalle, artiste franco-américaine reconnue pour ses sculptures monumentales colorées et ses Nanas, ces femmes voluptueuses et joyeuses. Niki nous plonge dans les méandres de son existence, marquée par l’inceste subi dans son enfance et une quête incessante d’émancipation.

Un récit poignant et sensible

Céline Sallette aborde avec finesse et sensibilité des thématiques délicates telles que l’inceste, le traumatisme et la résilience. Elle explore les blessures profondes infligées à Niki de Saint Phalle et son cheminement vers la guérison et l’affirmation de soi.

Une performance remarquable

Charlotte Le Bon, connu pour avoir joué dans le film « Ives saint laurent » livre une performance saisissante dans le rôle de Niki de Saint Phalle. Elle incarne avec justesse la complexité et la force de cette artiste hors du commun, capturant sa douleur, sa rage de vivre et sa créativité débordante.

Un film imparfait mais touchant

Si le film n’échappe pas à quelques faiblesses, notamment une certaine simplification de certains aspects de la vie de Niki de Saint Phalle, il n’en demeure pas moins une œuvre touchante et inspirante. Céline Sallette parvient à rendre hommage à cette artiste visionnaire tout en nous offrant une réflexion profonde sur les sujets de société qu’elle aborde.

Un certain regard : une sélection riche et souvent méconnu

Niki illustre parfaitement la richesse et la diversité de la sélection Un Certain Regard, qui met en lumière des films singuliers et audacieux. Si vous cherchez une œuvre originale et bouleversante, Niki est une excellente option.

Les héros du cinéma Cannois ne sont pas toujours à l’écran

La 77ème édition du festival de Cannes s’est achevé ce dimanche. Après avoir passé près de 11 jours à célébrer le cinéma, il est temps de célébrer ceux qui ont rendu possible une telle réunion. C’est en arpentant les couloirs du Palais des Festivals que nous pourront mettre en lumière ces héros invisibles.

Parmi les festivals de cinéma, celui de Cannes est bien le plus renommé de tous. Chaque année en Mai depuis désormais 77 éditions, nombreuses des grandes figures du cinéma se retrouvent autour de nouvelles œuvres. C’est l’occasion pour les réalisateurs de présenter des créations cinématographiques en tout genre. Le festival comptant plusieurs sélections distinctes, la sélection officielle récompensée de la fameuse Palme d’Or avec d’autres prix. Mais aussi la Quinzaine des Réalisateurs, la semaine de la Critique ou encore la programmation Acid. Seulement pour illuminer tout ces noms sous les feux des projecteurs et permettre à toutes ces sélections d’être projetées dans les dizaines salles différentes que composent le festival, ce sont d’autres héros de cinéma qui sont nécessaires. Des noms qui eux n’apparaîtront pas aux yeux des dizaines milliers de spectateurs accrédités par le festival, mais qu’il semble pourtant nécessaire de mettre a l’honneur.

Dans les couloirs du Palais des Festivals, les smokings, tailleurs et robes noirs vont et viennent. Les spectateurs et journalistes sont tous vêtus de tenue de soirée, le nœud papillon étant obligatoire si vous voulez accédez au tapis rouge. Seulement parfois, au sein de cette foule et entre quelques visages familiers de journalistes comme ceux de Laure Adler ou Patrick Cohen, quelques notes de orange et bleu ressortent. Ce sont les hôtes et hôtesses d’accueil du festival, de jeunes gens le plus souvent, qui guident et accompagnent ce public si particulier qu’est celui de Cannes. Ils arborent tous sur le torse une petite palme d’or, comme une médaille discrète qui les récompenserait eux aussi pour leurs services précieux. Ce sont les hommes et femmes de l’ombre, presque invisibles tant ils sont bons malgré leurs couleurs flashy. Chacun exerçant dans leurs tenues respectives, que ce soit ces vestes bleues foncées et ces jupes oranges des guides du Palais des festivals. Ou bien les robes noires et au liseré dorée des hôtesses du Grand Théâtre Lumière, salle la plus prestigieuse. Ou enfin quand dans les endroits où le public ne va pas, les débardeurs et shorts pleins de poches des techniciens et machinistes, qui installent et désinstallent toutes les scènes lorsque que le public cannois profite des douces soirées de la fin mai. Ils sont saisonniers, étudiants ou intérimaires et dévouent leurs temps durant cette dizaine de jours à ce que tout ces films soit vus dans les meilleurs conditions, pour vous.

Les noms de ceux que l’on ne voit pas

Cette année sur le tapis très soigneusement apprêtés par leurs soins, de grands noms du cinéma défileront. Francis Ford Coppola, Demi Moore, Jacques Audiart, Greta Gerwig ou encore Georges Lucas à la reconnaissance pourrait-on dire interplanétaire se succèdent. Et c’est pourtant ceux dont on ne connaît pas le nom qui veillent a ce que tout se passe bien. L’un d’entre eux est Ryan, agent de sécurité pour le plateau télé extérieur de France Télévisions en édition speciale à Cannes. Chaque année ce jeune homme proche de la trentaine origine de région parisienne vient spécialement en côte d’azur pour travailler au festival : « un ami m’a donné l’opportunité, c’est toujours un plaisir de venir ici ». Le reste de l’année il effectue des contrats en sécurité très classique mais en été c’est l’occasion de revêtir son costume deux pièces et ses lunettes de soleil noires. Et si Ryan est de l’autre côté des caméras, il n’en a pas moins l’âme d’un acteur. En faisant patienter le public des émissions télévisées dont il a la surveillance, il nous dit : « j’adore faire rire les gens en attendant le début des émissions, je fais des blagues ça fait passer le temps et les gens sont de bonne humeur ». Un humour qui a également su fait mouche auprès de nous. A l’année il nous dit discrètement faire quelques Tik Tok et nous explique avoir son petit public, une autre forme de célébrité dans son style.

Comment célébrer ces héros de l’ombre ?

Pour rendre leurs honneurs à ces acteurs invisibles, il existe à Cannes une petite tradition. En effet il n’échappera à personne qui vient voir un film au festival qu’avant chaque projection est mis en avant un générique spécial au contexte cannois. On y observe les marches du tapis rouge qui émergent d’une eau probablement Méditerranéenne pour atteindre le symbole bien connu de la palme d’or, bordé de l’écriture « Festival de Cannes » et du nom de la sélection dont il est question. La première fois que l’on y assiste on se retrouve soudainement face à l’effervescence du public, il applaudit cette montée des marches virtuelles. On est en droit de se demander pourquoi célèbre-t-on un écran diffusant un simple générique sans personne pour recevoir ces honneurs. Mais en réalité, en fêtant ce générique du festival de Cannes, ce sont tout ses salariés, hommes et femmes qui y travaillent que nous célébrons. Alors si un jour l’occasion se présente à vous de vous rendre au festival, ne soyez pas avares d’applaudissement envers tout ceux qui y officient jour et nuit afin de rendre possible aux autres le partage de leurs passions et du contenu de leurs imaginations. Hôtesses et hôtes d’accueil, concierges, femmes et hommes de ménages, agents de sécurité, chauffeurs, techniciens, machinistes, projectionnistes, éléctros-éclairagistes, autant de gens loin du monde des stars sans qui le plus grand festival de cinéma au monde ne serait pas possible.