La sélection prometteuse et talentueuse du 74ème Festival de Cannes

La sélection officielle du Festival de Cannes s’est fait attendre cette année. Nous connaissions déjà quelques titres de films présents pour la compétition qui se déroulera du 6 au 17 juillet : Benedetta de Paul Verhoeven, The French Dispatch de Wes Anderson, Annette de Leos Carax qui sera projeté en ouverture du festival et plus récemment Tre Piani de Nanni Moretti, un autre habitué des marches cannoises. Malgré l’attente et une envie montante de découvrir de nouvelles œuvres internationales, la sélection annoncée par Pierre Lescure et Thierry Frémaux ce jeudi 3 juin à 11h00 au UGC Normandie ne déçoit pas.

Composée de soixante-et-un films, cette sélection est à la fois généreuse et réjouissante, notamment en ce qui concerne les films en compétition ainsi que Cannes Premières, une section inédite où l’on retrouve de grands noms du cinéma mondial. Nous attendons impatiemment, par exemple, le prochain long-métrage d’Andrea Arnold, Cow, qui s’était fait remarquer avec American Honey en 2016. De même que nous nous félicitons de la présence régulière de Mathieu Amalric (Serre-moi fort), d’Arnaud Desplechin (Tromperie, adapté d’un roman de Philip Roth), du rohmérien Hong Sang-soo (In Front of your Face) et de la sulfureuse Eva Husson (Mothering Sunday).

La section Un Certain Regard revient cette année « à sa forme d’origine », selon les termes employés par Thierry Frémaux, une sélection plus proche de ce qu’avait imaginé Gilles Jacob en initiant cette section porteuse de nouveaux talents en 1978. Ainsi, six premiers films seront montrés cet été sur la croisette. La sélection affiche dès lors sa volonté de mettre en avant de jeunes réalisateurs, des essais inédits, portés par des cinéastes de renoms à l’instar de La Civil, premier film de Teodora Ana Mihai et produit par les frères Jean-Pierre et Luc Dardenne. Nous retenons aussi une dominante européenne continentale dans cette sélection avec deux films russes (Delo, Les Poings Desserrées) et deux films autrichiens (Moneyboys, Great Freedom).

Enfin, la compétition officielle reste très alléchante, notamment parce qu’elle comporte des productions d’auteurs réguliers à Cannes (Bruno Dumont, Jacques Audiard, Apichatpong Weerasethakul, François Ozon, Asghar Farhadi), confirme d’autres metteurs en scène plus récents (Joachim Trier, Justin Kurzel, Sirill Serebrennikov ou encore Julia Ducournau), qui avaient déjà montré un film lors de la décennie précédente, et nous surprend avec de nouveaux noms (Juho Kuosmanen et Nadav Lapid qui a remporté l’Ours d’or à Berlin pour Synonymes en 2019). Une sélection plutôt européenne, nord-africaine et moyen-orientale, marquée par plusieurs thèmes (celui de l’identité et de la répression, deux enjeux de nos sociétés modernes) et par des genres cinématographiques.

Parmi les vingt-quatre films sélectionnés de la compétition officielle, notre équipe de jeunes journalistes retient certains nommés. Drive My Car de Ryusuke Hamaguchi d’abord, qui a déjà séduit le public avec le très sensible Asako I&II en 2018 ou encore Senses (film en cinq volets) et qui revient avec une adaptation du très célèbre romancier japonais Haruki Murakami : une histoire d’adultère et d’amitié comme sait bien les raconter le réalisateur japonais, probablement un de ceux qui filme le mieux les relations amoureuses de nos jours. Les Petrov, La Grippe, etc de Kirill Serebrennikov (son précédent film, Leto, a durablement marqué le Festival de Cannes en 2018) égaye aussi notre curiosité : il s’agit d’une adaptation d’Alexeï Salnikov et les premières images laissent présager une œuvre à la mise en scène travaillée.

Du côté de l’Amérique latine, le cinéaste thaïlandais Apichatpong Weerasethakul participe à la compétition officielle de Cannes avec son film Memoria. Il s’agit de sa première expérience de tournage en sol étranger, coproduite par la boite colombienne de production Burning. Memoria loin d’être un pamphlet politique, est une allégorie de la lutte de la mémoire contre l’oubli. Au-delà de l’exotisme amazonien, les rencontres amicales entre Tilda Swinton et Jeanne Balibar ouvrent une invitation au spectateur à s’immerger dans une atmosphère polaire et surréaliste de l’histoire colombienne.

Les autres long-métrages retenus nous enchantent aussi et nous reviendrons sur nos plus grosses attentes dans un article ultérieur. En attendant la montée des marches et les séances fabuleuses à venir, nous patientons avec les quelques images de France, des Olympiades ou encore de Julie (en 12 chapitres). Riche et prometteuse, cette sélection cannoise ne fait que récompenser notre bouillonnement cinéphile depuis la réouverture des salles !

 

Article écrit avec la participation d’Alice Grasset et de Patricia Menjura