LA TORTUE ROUGE, de Michael Dudok de Wit 

Animation, 1H20, néerlandais

Peu visible au Festival de Cannes, le cinéma d’animation se fait pourtant remarquer cette année, et pour cause, la sélection Un certain regard présentait mercredi 18 mai La Tortue rouge, de Michaël Dudok de Wit : une merveille de l’animation.

L’histoire commence par le naufrage d’un homme qui va se retrouver face à lui-même sur une île déserte où il va devoir réapprendre à survivre et à vivre. Il ne s’agit en effet pas seulement d’être capable de se nourrir ou de savoir se construire un abri, mais de pouvoir retracer seul les grandes étapes de la vie humaine. La beauté et l’importance de ces étapes sont ce que le film nous raconte. Tout en délicatesse et subtilités, Michaël Dudok de Wit nous plonge dans la psyché de cet homme, qui à travers fantasmes et hallucinations, va vivre , aimer, trouver du courage face à ce qui l’effraie et dépasser ses peurs, puis mourir accompagné par celle qu’il a inventé. C’est en lui-même qu’il puise sa propre force, à travers une réalité altérée nécessaire à sa vie.

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De plus, la poésie de ce scénario est portée par une beauté visuelle et musicale à couper le souffle. Animation hybride, ce film mêle crayons numériques, animation par ordinateur et dessins faits à la main. Ainsi, si Michaël Dudok de Wit a repensé son style pour son premier long métrage, on lui retrouve malgré tout la simplicité du trait, les décors épurés et le mutisme de ces courts-métrages (Father and Daughter, Le Moine et le poisson).  Pour ceux-là, son trait s’inspirait largement des arts asiatiques d’où jaillit le perpétuel mouvement et la vie. Cela peut expliquer pourquoi Isao Takahata (Le Tombeau des lucioles, Le Conte de la Princesse Kaguya), co-fondateur du célèbre studio japonais Ghibli avec Hayao Miyazaki (Princesse Mononoké, Le Voyage de Chihiro), tombé sous le charme de son travail a tant insisté auprès du réalisateur néerlandais pour coproduire un long métrage.

La bienveillance et la tolérance que Michaël Dudok de Wit semble éprouver pour l’Homme dans son état de nature nous rend foi en l’humanité. Cette ode à la nature, à la famille, aux émotions et à l’amour est un enchantement cinématographique à voir de toute urgence.

 

Sophie Dajean