Les filles du soleil : la cause des femmes ne méritait pas ça !

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Les plus mauvais films, comme l’enfer, sont pavés de bonnes intentions. C’est le cas des Filles du soleil, deuxième long-métrage d’Eva Husson, que l’on peut considérer comme le premier vrai crash de la sélection officielle.

 

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Image du film Les filles du soleil.

Sur le papier, tout était parfait : une production confortable, avec des helicos, des vues aériennes, des décors de scènes de guerre très réalistes, un casting à la fois glamour et intello-compatible (Golshifteh Farahani et Emmanuelle Bercot en têtes de gondole). À l’arrivée, Eva Husson livre un film boursouflé, suffisant, qui pérore sur le courage des femmes en faisant allègrement l’impasse sur la complexité de la situation qu’il décrit.

Passons sur les scènes qui traînent en longueur, les lumières esthétisantes, le vent toujours opportun qui place les mèches de Golshifteh Farahani comme dans une publicité L’Oréal… le plus grave au fond, c’est que Les filles du soleil ne traite pas son sujet. On est dans la zone turco-syrienne, où les combattantes kurdes livrent un combat sans merci contre Daech… sauf que nous pourrions être partout ailleurs, le film serait le même. Car Eva Husson semble ne pas s’intéresser à son sujet, trop passionnée, au fond, par son ode féministe portée par des textes ampoulés (aïe le texte final !) et une musique au lyrisme envahissant et quasi totalitaire. L’état islamique n’est jamais nommé, remplacé pudiquement par « les extrémistes », pour ne prendre aucun risque… C’est tellement plus facile de faire de belles images d’attaques à l’aube, où l’on montre que les femmes, aussi, savent se battre. Erreur fondamentale d’un féminisme bas-de-gamme qui n’a que trop cours ces derniers mois : il faut absolument montrer que les meufs ont des couilles mais qu’elles sont sensibles quand même…

Et pour mener ce combat, qui intéresse davantage la réalisatrice que la guerre en Syrie, c’est l’artillerie lourde qu’elle déballe : un symbolisme d’une lourdeur de pachyderme (ah l’accouchement sur la frontière !, la journaliste borgne prénommant sa fille Iris !), des dialogues définitifs (« si nos seins faisaient couler du pétrole plutôt que du lait, la coalition aurait bombardé plus vite »), le surjeu permanent (Golshifteh Farahani ne peut rien dire sans prendre un air de tragédienne, en Emmanuelle Bercot ne peut pas faire la journaliste sans jouer Albert Londres).

Tout cela est confondant de naïveté, de lourdeur et pour tout dire de grotesque, et ce film n’a strictement rien à faire en compétition. On ne peut que soupçonner derrière sa sélection un bon coup de com’, qui fait partie du package avec la montée des marches des 82 femmes.

Ne mélangeons pas tout, la com’ n’a en général rien à voir avec l’art. Et les plus belles causes devraient veiller à qui les défend.

La rédaction