Météo chinoise

Météo chinoise

Clichés, caricatures, stéréotypes, la culture chinoise souffre encore de cette vision occidentale

J’ai découvert le cinéma chinois en famille avec des personnages populaires comme Jackie Chan ou Bruce Lee, accessoirement connu pour ses films américains bien sûr. Depuis de l’eau a coulé sous les ponts, j’ai fait connaissance avec le cinéma progressiste chinois avec notamment Jia Zhangke. Puis en 2018, je suis partie en Chine. J’avoue y avoir été un peu à reculons. Même quand on a l’habitude de voyager, on ne peut s’empêcher d’avoir des idées préconçues. La Chine, on m’en avait dit du bien, et surtout du mal. Eh bien, grande surprise, on peut dire que je me suis pris un revers en pleine figure mais de manière positive. Depuis, j’ai souvent envie de parler de la culture chinoise autour de moi et je ne peux que réaliser tristement à quel point celle-ci est encore trop méconnue en occident et souffre de préjugés pas “super cool”, souvent négatifs si vous voyez ce que je veux dire. Pour commencer, il faut avoir en tête que la Chine est prise depuis toujours dans un tourbillon de changements qui n’épargne aucun domaine. Le cinéma est le témoin privilégié des bouleversements au sein de la société chinoise.

The next generation baby

En Chine quand on parle cinéma, on parle « génération ». C’est un terme qui est venu d’un journaliste hongkongais qui cherchait une manière de classer le cinéma chinois. Aujourd’hui, il existe six générations de cinéastes depuis l’arrivée du cinéma en Chine.

80’s/90’s In the mood for love

Le début des années 80 marque un tournant dans l’histoire du cinéma chinois avec l’arrivée de la 5e génération. Il est donc l’heure pour nous, occidentaux, de faire connaissance avec le cinéma chinois contemporain. Les cinéastes qui en font partie ont dressé à leur manière une fresque romanesque de cette Chine provinciale/urbaine qui a vécu des transformations fulgurantes et radicales au cours de ces dernières années. La plupart, ont filmé les masses, la vie d’une majorité de chinois, la vie de gens simples qui sont l’essentiel de la société chinoise, trop rarement portée à l’écran. C’est la naissance du cinéma chinois sur la scène mondiale. Jusque là étouffé et utilisé uniquement comme outil de propagande du pouvoir, et ce, jusqu’à la fin de la Révolution culturelle en 1976. La mise en scène de ces cinéastes met en parallèle les contrastes dus à l’évolution historique et économique de la société chinoise mais aussi les contrastes géographiques dus aux développements inégaux des provinces chinoises.

En ce qui concerne, la 6e génération de cinéastes, aidés des nouvelles technologies numériques, ces cinéastes utilisent la technologie pour montrer des « images interdites » ou pour pratiquer un art de l’opposition. On peut parler de l’œuvre de Cui Zi’en, le « parrain du cinéma queer chinois ». Entre cinéma d’auteur et cinéma populaire, ils travaillent à renouveler des genres traditionnels afin de restituer une image plus juste de la société chinoise.

Et Cannes alors ? (parlons-en quand même)

Le festival de Cannes et le 7e art chinois se sont rencontrés dans les années 90 avec le film de ZHANG Yimou Ju dou et finalement ne se sont jamais quittés.  On peut dire que l’intérêt pour le cinéma chinois au Festival de Cannes ne cesse de croître de plus belle depuis. Au compteur,  la Chine a remporté pas mal de prix : une Palme d’or en 1993 pour  Adieu ma concubine de Chen Kaige, le prix de la mise en scène avec le film Happy Together de Wong Kar-Wai ou encore le prix du scénario pour The Touch of Sin de Jia Zanghke et bien d’autres célébrations.

Pour cette 72e édition, on peut dire que les cinéastes chinois explorent la société chinoise avec les armes du polar : en compétition Le lac des oies sauvages de DIAO Yinan et dans la sélection Un certain regard  : Summer of Changsha de Liu Yu Tina. On n’a plus qu’à souhaiter beaucoup de courage et d’audace à ces cinéastes qui se battent quotidiennement contre la censure nationale. Eux aussi méritent leur place au soleil sur le devant de la scène mondiale. L’Empire du milieu laisse aujourd’hui la place à une génération de nouveaux cinéastes chinois bouillonnant de créativité. Ils sont beaux, sentent la pluie, l’océan et les crêpes au citron (comme les bretons quoi), euh non pas du tout…

Allez, bois un thé mon ami et profite de la vie.