Summer of Changsha – Liu Yu Tian : Décousu Main

Summer of Changsha – Liu Yu Tian : Décousu Main 

Cette année à Cannes, les films construits de manière binaires, voir dichotomiques comme Nina Wu, ou Parasite, n’ont pas manqués de marquer les festivaliers. Sélectionné au sein d’Un Certain Regard, Summer of Changsha de Zu Feng, moitié polar noir, moitié drame social, ne dérogera pas a la règle sans pour autant ravir l’ensemble de ses spectateurs.

L’inspecteur Bin, interprété par le réalisateur Zu Feng, cherche à quitter ses fonctions policières, mais la procédure s’éternisant, celui ci va se retrouver a enquêter pour une dernière fois sur un sombre meurtre, dont le premier élément est un bras découpé abandonné sous un pont. Le voila donc amené à vivre un autre été à Changsha. L’intrigue se développe autour de l’enquête, de ses suspects, ses victimes, avec son lot de course poursuite et d’interrogatoires, et rythmé par des rebondissements purement policiers. L’auteur passe à coté d’un message politique qui aurait pu être porté a travers la police de Changsha, raisonnant sur l’ensemble de la Chine. Non, le film ne sera pas de cet acabit. Il s’en tiendra seulement a une introduction posant les bases de son énigme. 

Arrive cette rencontre avec une mystérieuse femme, Liu Xue, plongeant Bin et elle dans une relation douloureuse, ou les plaies du passé et l’amour naissant feront office de nouvelle problématique. A ce moment là, le polar noir glisse petit à petit vers le drame social. L’enquête se chrystalise, les profils de nos deux protagonistes s’élargissent autour de leurs relations. Cette deuxième partie de film ne fera jamais écho à la premiere, invitant le spectateur à passer à autre chose. Coup dur pour certains, délivrance pour d’autres. C’est bien ce « deuxième film », qui m’a pourtant ému. Sur près d’une heure, Liu Xue et le désormais ex-policier Bin, panseront leurs peines : la résilience mêlée au deuil d’un proche. La résilience de ces personnages ne pouvant affronter ces deuils tels qu’ils l’auraient voulus. Bin et Liu Xue ne sont plus que des âmes errantes damnées par une existence pleine de désespoir. 

Zu Feng n’aura finalement pas su donner de la cohérence entre ses « deux films ». L’esthétisme onirique subtile et réussi ne compensera pas la construction bancal de son scénario. Bien que fort dans la progression émotionnel de ses personnages, Summer of Changsha souffre d’un manque de clarté dans son propos. La dichotomie de son film ne sera rien d’autres qu’une faiblesse, là ou des films comme les Etendues Imaginaires de Siew Hua Yeo ou un Grand Voyage vers la Nuit de Bi Gan, en ont fait leur force.