Titane de Julia Ducournau : entrée imposante du film de genre à la française

En 2016 était projeté pour la première fois, alors en compétition sur les listes de la Semaine de la Critique, Grave de Julia Ducournau, qui fit l’effet d’une bombe dans le paysage des films de genre français. Cinq ans après, la réalisatrice (l’une des seules en compétition) s’apprête à dévoiler Titane ce 14 juillet, cette fois en compétition officielle. Le résumé ? « Titane : Métal hautement résistant à la chaleur et à la corrosion, donnant des alliages très durs, souvent utilisé sous forme de prothèses en raison de sa biocompatibilité. »

Le pitch est évasif et propose un casting aussi prometteur qu’intrigant (Vincent Lindon, Dominique Frot, Agathe Rousselle et Garance Marillier, muse de la cinéaste). S’éloignant au premier abord du coming of age adolescent et cannibale qu’avait servi Grave, Titane se présente comme un thriller horrifique et course contre la montre, avec un soupçon de huit clos. Le film est posé en doubles intrigues : un père retrouve son fils disparu dix ans plutôt, alors qu’une série de meurtres sinistres ravage la région.

 

Julia Ducournau, très secrète quant à la production du film, semble toutefois rester sur des thématiques qui lui sont chères « l’identité, la filiation, et le genre », déjà très présentes dans Grave ou Junior, un court métrage de 2011 mettant en scène les tumultes comico-horrifiques d’une jeune fille entrant dans l’adolescence. Le bodyhorror, grand ressort narratif et esthétique maitrisé par la réalisatrice, parait également faire son grand retour dans Titane. La bande annonce, électrique, annonce la couleur : rouge bleuâtre, organique et anxiogène sur un fond détaché de She’s not there des Zombies. « C’est un entrelac » a affirmé la réalisatrice.

Garance Marillier, qui incarnait la protagoniste principale dans Grave, revient dans Titane© Diaphana Films

Programmation intense 

2020 a eu son temps de suspension avec la pandémie du Covid-19, chamboulant tout l’agenda de l’industrie cinématographique. Festivals et tournages annulés, la production ne s’est pour autant pas complètement arrêtée. Entre deux confinements, les réouvertures des salles de cinéma ont tout de même pu proposer une palette cinématographique intéressante, avec une part inédite aux films de genre. Teddy, des frères jumeaux Ludovic et Zoran Boukherma, sélectionné au Festival de Cannes 2020, rencontre son petit succès en salle depuis sa sortie le 30 juin, de la même façon que The Deep House, de Alexandre Bustillo et Julien Maury, a cumulé 23 381 entrée à sa première semaine d’exploitation. D’autres noms se sont distingués d’une manière ou d’une autre entre 2020 et 2021 : Méandre de Mathieu Turi, Le Dernier Voyage de Romain Quirot, Nuée de Just Philippot et prochainement Comment je suis devenu super-héros de Douglas Attal (sur mais seulement sur Netflix). Adieu Les Cons, de Albert Dupontel, plus encré dans une filiation à son réalisateur que dans la nébuleuse appellation de genre, avait lui aussi tiré juste, empruntant habilement les codes de la comédie horrifique (à moindre dose tout de même). De bonnes nouvelles donc, puisque ces films trouvent un public de plus en plus diversifié et enthousiaste.

Teddy © The Jokers

 

En attendant… que souhaiter de Titane, vitrine léchée au plomb du cinéma de genre français à Cannes… Thriller horrifique ? Anticipation cyborgienne ? Inclassable ? « Hors norme »[1] ? Une chose est sûre, les salles françaises  (et Les Festival manifestement) manquent encore cruellement de réalisatrices, mais au moins, ne se dérobe plus face à ses nouveaux genres… Et Titane n’en est pas un mauvais.

[1] Communiqué de presse de Arte