Cannes, festival de tous les excès

Regarder des films toute la journée, faire la fête tous les soirs, acheter des nouvelles chaussures et de nouveaux vêtements… Que permet le festival de Cannes qu’on ne fait pas dans la vie de tous les jours ? Ou plutôt que fait-on sous prétexte du festival de Cannes, et qui est infaisable dans la vie ordinaire ?

 

En préparation de mon séjour à Cannes depuis déjà une bonne semaine, j’ai réalisé le premier des nombreux excès autorisé par le festival : l’achat de vêtements, et plus particulièrement, celui de chaussures et de robes. Comprenez-vous, il me fallait bien une belle robe pour monter les marches et me pavaner sur le tapis rouge. Et puis des escarpins qui vont avec, sinon de quoi aurais-je l’air ? Et d’ailleurs, pendant que j’y pense, il me faut une autre robe pour aller avec les sandales à talons achetées sur internet. Ce n’est pas forcément pour moi mais pour le festival de Cannes !

Mettre ensuite tous ces habits dans une valise. Réaliser qu’elle est trop petite, qu’il n’y a plus de place. Et voir que la moitié des affaires n’y sont même pas mises. Pour partir cinq jours, le bagage aurait pourtant dû suffire. Mais là, c’est Cannes ! Et je m’indigne du fait que les fabricants de bagages n’aient pas prévu d’en faire une spécialement pour le festival. C’est-à-dire, une qui serait plus longue, plus large aussi, avec des pochettes pour quatre-cinq paires de chaussures, un espace pour que les robes ne se froissent pas et avec une promotion : pour tout achat, le porteur de valise offert ! Bon, je crois que le plus simple est que je prenne une valise plus grande.

Puis, regardant la pluie tomber (la même qui se déchaîne en ce moment sur Cannes, décidément on en revient toujours au même sujet), je pense à ce que je ferai là-bas. Et particulièrement à ce que ferai à Cannes que je ne pourrai pas dans ma vie ordinaire. Si ! vous savez ! La vie de tous les jours, celle vers qui je vais revenir après ma semaine de strass, de paillettes et de projecteurs.

Tout d’abord, je désobéirai à l’un des préceptes parentaux qu’on nous inflige dès notre plus tendre enfance : je vais regarder des films toute la journée. Mais ce, sans traîner sur le canapé ! En allant au cinéma plusieurs fois par jour, en y accédant avec cette chère accréditation. Et je ne deviendrai pas insociable pour autant, comme on aime à penser des individus qui se prélassent devant leur télévision toute la journée.

Et au contraire ! Dans les files d’attente (assez récurrentes) à l’entrée des salles de cinéma, nous serons entourés d’amateurs du 7ème art, de journalistes généralistes ou cinématographiques. En être social qui se respecte, je me socialiserai et romprai ainsi avec une règle instaurée par la société, par laquelle on ne parle pas aux inconnus. Au festival de Cannes, « parler aux inconnus » est aisé : dans la rue, sur la croisette, au restaurant, dans les soirées. Il n’y a plus (ou moins) de règles d’inhibition. Et ce, parce que le festival, outre d’être un événement cinématographique de référence, est également un lieu de rencontres et de contacts.

À la fin de cette journée entièrement consacrée au cinéma, il y a la soirée entièrement consacrée… à la fête ! Mon accréditation me permettant d’entrer dans tous les antres des Bacchanales modernes, le choix du lieu risquera d’être compliqué. Mais comme à Cannes, la fête, c’est tous les soirs, je vais pouvoir essayer de nombreux endroits. (Oui oui, j’ai bien dit tous les soirs.)

Si je résume, qu’est-ce Cannes ? Un grand festival cinématographique, oui. Mais encore ? C’est le festival de tout. Le festival de tous les prétextes pour acheter des vêtements et des chaussures en quantité infinie, pour discuter avec n’importe quelle personne. C’est le festival de tous les excès, qui nous autorise à visionner des films toute la journée et à faire la fête tous les soirs. Et si nous faisions toutes ces choses dans la « vie hors-Cannes », nous serions qualifiés d’accros du shopping, de superficiels,  de paresseux, et j’en passe. Finalement, Cannes, c’est aussi le festival du « Tout est permis » !

 

Florine Garreau