Cannes 2024 : quels sont les 11 films sélectionnés pour la Semaine de la Critique ?

La Semaine de la Critique, section parallèle du Festival de Cannes dédiée aux premiers longs métrages de cinéastes du monde entier, a dévoilé aujourd’hui sa sélection pour l’édition 2024. Connue pour mettre en lumière de nouveaux talents et des films audacieux, cette section est très attendue par les cinéphiles du monde entier.

Pour établir la sélection, 1050 longs métrages et 2150 courts métrages ont été visionnés. A l’arrivée, seul 7 longs métrages ont été sélectionnés pour être en compétition et la sélection des 13 courts métrages en compétition sera annoncée le 18 avril prochain

Un jury prestigieux pour décerner les prix

Après Audrey Diwan, c’est le réalisateur espagnol Rodrigo Sorogoyen qui présidera le jury de cette 63e Semaine. Le jury sera aussi composé de personnalités reconnues du monde du cinéma tels qu’Alba Baptista, actrice portugaise, Ladj Ly, réalisateur français, Maha Haj, réalisatrice palestinienne, Michel Merten, directeur de la photographie belge, Pierre-Simon Gutman, critique de cinéma français.

Le jury aura la lourde tâche de décerner les prix de la Semaine de la Critique, dont le Prix France 2, le Prix Fondation Louis Roederer et le Prix Nespresso.

Tous les longs métrages sélectionnés :

Comme l’an dernier, avec Ama Gloria et La Fille de son père, la France sera à l’honneur au début et à la fin, avec comme film d’ouverture « Les Fantômes » de Jonathan Millet (France) et en Clôture « Animale » d’Emma Benestan (France)

En Compétition :

  • Baby de Marcelo Caetano (Brésil)
  • Blue Sun Palace de Constance Tsang (États-Unis)
  • Julie zwijgt / Julie Keeps Quiet de Leonardo Van Dijl (Belgique)
  • Locust de Keff (Taïwan)
  • La Pampa d’Antoine Chevrollier (France)
  • Rafaat einy ll sama / The Brink of Dreams de Nada Riyadh & Ayman El Amir (Égypte)
  • Simon de la montaña / Simon of the Mountain de Federico Luis (Argentine)

Séances spéciales :

  • La Mer au loin de Saïd Hamich Benlarbi (France)
  • Les Reines du drame d’Alexis Langlois (France)

Il est important de noter que la sélection des courts métrages sera annoncée le jeudi 18 avril, et que de nombreux événements spéciaux et rencontres sont également prévus tout au long de la Semaine et serons annoncer dans les prochaines semaines. Je vous conseil sont de rester a l’écoute pour ne rien  manquer de la programmation de la Semaine de la Critique 2024 !

Une photo de famille, et puis plus rien…

Cannes affectionne la figure de l’acteur-passé-à-la-mise-en-scène. C’est une figure classique du cinéma, qui réussit à certains (George Clooney, Mathieu Amalric), moins à d’autres (Sean Penn, Guillaume Canet), mais qui dit combien la mise en scène doit démanger ceux qui ont coutume d’être dirigés. Ce grand saut, Paul Dano (Little miss sunshine, There will be blood, Youth) vient de le tenter. Il présente Wildlife à la Semaine de la critique, réputée la sélection la plus exigeante du Festival de Cannes.

 

Image du film Wildlife

C’est avec une humilité presque de petit garçon que Paul Dano, l’une des coqueluches d’Hollywood, a présenté son premier film (qui peut lui faire prétendre à la Caméra d’or). Une voix un peu fluette, quelques hésitations, et une absence totale d’assurance : le comédien aux allures d’adolescent fait sa mue devant les spectateurs de l’espace Miramar. L’acteur fait place au cinéaste. A pas feutrés. Dano, pourtant, réussit son pari. Car Wildlife n’a rien d’un film prétexte censé consacrer un « acteur qui serait plus qu’un acteur ». C’est un vrai film de cinéma, une vraie mise en scène qui va chercher ses références du côté d’Edward Hopper ou de Todd Haynes, une vraie identité visuelle. Une vraie douleur aussi.

La grande réussite du film, dont le pitch simplissime se résume à l’explosion d’une famille américaine moyenne dans le Montana des sixties, tient dans son parti pris scénaristique : utiliser le personnage du fils, Joe, comme pivot de l’histoire. Dano choisit la focalisation sur l’adolescent pour montrer comment les déchirements de ses parents vont faire de lui ce qu’il deviendra. Ainsi, nous regardons Joe regarder. Nous le voyons assister, souvent impuissant, aux errances de sa mère et à l’absence de son père. Nous voyons son regard enregistrer, comme un spectateur, le drame familial en train de se jouer, comme si Joe, qui apprend la photographie, apprenait aussi à filmer la vie.

Car Joe sera un homme d’images et de sons, comme nous le montre la très belle scène finale. Un portrait de famille d’après les fêlures. Le drame a eu lieu, mais tout le monde sourit. Un portrait de famille, et puis plus rien… Le clic de l’appareil photo, c’est à la fois la fin du film et le début de la vocation de Joe. Il sera regardeur. Comment ne pas voir, dès lors, la ressemblance troublante entre l’acteur choisi pour jouer Joe, Ed Oxenbould, et Paul Dano lui-même ? « Joe Brinson, c’est moi », pourrait dire Dano pour parodier Flaubert. Le devenir cinéaste, chez Dano, paraît lié aux blessures de l’enfance.

Dans Youth de Paolo Sorrentino (2015), Paul Dano joue le rôle d’un comédien abonné aux rôles de super-héros, et qui voudrait qu’on le reconnaisse comme un auteur. Séquence prémonitoire. Trois ans plus tard, un auteur est né.

La rédaction

La -bouleversante- Vie en grand, Mathieu Vadepied

Le réalisateur Mathieu Vadepied a clôturé la Semaine de la Critique avec La Vie en grand.  Une histoire bouleversante, touchante, mais jamais pathétique !

11287343_10205406178166940_1572700558_nLe film suit le quotidien du jeune Adama dans la banlieue parisienne. Cet élève qui semble prometteur  est pourtant en échec scolaire. Sa mère ne sait pas lire et son père a dû les laisser tous les deux pour vivre avec sa première femme ; la polygamie étant interdite en France. Le manque d’argent se fait sentir et la détresse de sa mère semble difficilement supportable pour le jeune garçon…

Mathieu Vadepied a réussi son challenge et il ne nous déçoit pas ! Le film suit son cours sans tomber dans le pathos. Balamine Guirrasy qui joue le rôle de Adama est surprenant, de même que le petit Ali Bidanessy alias Mamadou ! Ils sont une source d’air frais dans un univers parfois oppressant. Les moments difficiles sont souvent teintés d’un sourire de ces deux jeunes héros qui ne perdent jamais de temps à se plaindre !

La Vie en grand est un retour à la dure réalité de la vie des cités françaises en 2015. Il nous rappelle que des choses simples peuvent nous rendre heureux, mais que le proverbe « l’argent ne fait pas le bonheur » reste bel et bien une grosse

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© Alexandra Drieghe / Cannes 2015

Alexandra DRIEGHE

Reprise des films en sélection parallèle à Paris

Séances de rattrapage pour nous, possibilité de voir les films en avant-première pour vous : les prochains jours à Paris, l’intégralité des films en sélection parallèle de cette édition cannoise seront rediffusés à la Cinémathèque, au Forum des Images et au Reflet Médicis.

– La sélection de la catégorie Un certain regard sera reprise au Reflet Médicis du 29 mai au 4 juin.
– La Quinzaine des réalisateurs au Forum des Images du 30 mai au 9 juin.
– Et la Semaine de la critique à la Cinémathèque du 6 au 10 juin.

Bonnes séances parisiennes… et à vos critiques ! Clap8 se fera un plaisir de discuter des films avec vous.

Broken, devenir Adulte

Il faisait partie de la Semaine de la Critique au Festival de Cannes. Une sélection parallèle qui révèle chaque année quelques chefs-d’oeuvre. Malheureux étudiants que nous sommes, à Cannes nous avons du faire des choix et l’impasse sur certains films. Broken, de Rufus Norris, fait partie de ceux que nous n’aurons pas eu la chance de voir en avant-première mais qui mérite largement une place de choix sur Clap 8 ! Séance de rattrapage.

Cassure d’enfance

La perte d’innocence : on a beau tenter le passage en douceur, c’est parfois brutal et traumatisant. Souvent ce n’est pas un moment, mais une langueur faite «de moments tristes et de moments heureux » comme le père avocat, Archie, imagine la vie de sa fille d’une dizaine d’années, Skunk. Broken, c’est cette cassure entre enfance et brutalité du monde Adulte. La perte d’innocence d’une gamine de banlieue, Skunk Cunningham (Eloïse Laurence) qui va devoir faire face au tourbillon infernal de la vie. C’est est une enfant constamment étonnée et étonnante. Ni jolie, ni laide, un peu garçonne mais pas tant que ça. Une gamine intelligente, vivante, drôle, joueuse, avec pour seules contraintes de vie son diabète et un père relativement absent, mais très aimant. Sa plus grande crainte est encore la rentrée en classe de 6e et sa plus grande tristesse celle de ne plus pouvoir tutoyer son ami (Cillian Murphy), compagnon de sa nourrice à la fois mère et amie, devenu son professeur. Mais elle va vite tourner cette relation en jeu, seul moyen de contourner les vexations : si elle doit se plier aux règles du vouvoiement alors il faudra qu’elle aussi devienne  «Mademoiselle Cunningham», et non « Skunk » dorénavant ! La stratégie bien rôdée lui donnera le sourire, mais c’est tout. Parce qu’à 10 ans, on ne maîtrise rien. Jeux et bienveillance vont bientôt laisser place à des violences en chaîne, un tourbillon infernal engagé par un triste dérapage. La malsaine surprotection d’un père envers sa fille va entrainer une fausse accusation de viol, trois vies détruites et Skunk un pied dehors, un pied dedans, comme observateur fragile de la déchéance de son quartier. Elle n’est jamais au centre des violences mais toujours assez proche pour se sentir concernée. Jusqu’à ce qu’elle soit fatalement prise pour cible, elle aussi.

Comment lutter ?

Tim Roth embrasse le rôle d’Archie, le père de Skunk, irréprochable père de famille, ce qui ne donne que davantage de crédit à la thématique abordée par Rufus Norris. Comment prévenir la naturelle perte d’innocence ? Comment être honnête et protéger à la fois ? Faut-il inventer une explication logique à une suite d’évènements qui n’en n’a aucune, juste pour rassurer ? Relation fraternelle, amourette, décharge automobile et «repaire» sur terrain vague seront les refuges de Skunk. Mais bientôt, la réalité finira par tout lui dérober, même ces bouts d’amour et de divertissement. Elle contemplera incrédule un chemin pauvre, miteux, glauque au bout duquel elle devra faire un choix : le courage de la conscience ou la fuite. Eclairages et lieux de tournage donnent au film sa couleur de miel et sa dimension pop servie par une musique splendide, signée Damon Albarn, fondateur des groupes Blur et Gorillaz. Broken, c’est un petit bijou sensible et terriblement révélateur de la Vie qu’il faut s’empresser de découvrir.