Inaugurée lors de la 31e édition du Festival de Cannes, la section Un Certain Regard, met en avant des films originaux et les futurs Talents du cinéma français et international. Depuis 1998, les films de la section sont mis en compétition et évalués par un jury de 5 professionnels du cinéma. Cette année, l’actrice, productrice et réalisatrice italienne Valeria Golino était la présidente du jury. À ses côtés, l’actrice polonaise Joanna Kulig, la réalisatrice américaine Debra Granik, l’auteur-compositeur et interprète Benjamin Biolay et l’acteur et producteur vénézuélien Édgar Ramírez.
Avec l’équipe Clap8, nous avons pu assister à la cérémonie de clôture suivie de la projection du film ayant reçu le prix Un Certain Regard.
« Notre section Un Certain Regard avait une exceptionnelle sélection cette année, ce qui a rendu le travail du jury très intéressant, mais très difficile. Nous ne pouvons pas décerner un prix à tous les films, néanmoins, ils ont tous eu un impact signifiant sur nous. Ces 20 films étaient un tour de force de talents, de puissantes performances, et d’inspirantes cinématographies. L’écriture, le courage, et la bravoure montrés en s’intéressant à la survie et à l’existence, dans notre présent et notre passé, ne peuvent être ignorés : BRAVO » – Valeria Golino
La tendre indifférence du monde (Laskovoe bezralichie mira) de Adilkham YERZHANOV (son 5ème film) est une poésie cinématographique. Il a été présenté dans la sélection « Un certain regard. »
Saltanat et Kuandyk habitent tous les deux à la campagne où ils mènent une vie paisible. Saltanat vient de perdre son père et sa famille est écrasée sous les dettes qu’il a laissées. Pour aider sa famille, Saltanat se voit obligée de se marier à un homme d’affaire riche. Elle doit donc se rendre à la ville pour rencontrer son futur mari. Kuandyk décide de l’accompagner et de veiller sur elle. Le couple doit alors faire face à une suite d’événements cruels. Guidés par une citation de L’Etranger d’Albert Camus, ils vont essayer de se battre contre le sort.
On peut reprocher à la narration d’être linéaire malgré tous les malheurs qui arrivent aux protagonistes. Le film est entièrement contemplatif et les personnages sont, dès le début, voués à une fin tragique, des Roméo et Juliette kazakh. Mais quelle belle histoire d’amour ! Un amour si pur et innocent qu’il est difficile à trouver au cinéma dernièrement.
Le réalisateur ne voulait pas que ses personnages soient des clichés et il a réussi. Saltanat et Kuandyk sortent du lot. Kuyandyk est quelqu’un de sincère et bon enfant. Son talent et son imagination permettent à Saltanat de fuir la réalité. Saltanat est pleine de courage et de détermination. Ils sont tous les deux coupés des rouages de cette société corrompue dans laquelle ils vivent. Et surtout, ils s’accrochent à leurs convictions jusqu’à la fin.
Ce petit bijou est une histoire intemporelle et se repose sur la photographie. C’est presque un tableau animé, hyperréaliste. Les plans sont fixes et longs. La caméra semble « extérieure » à l’intrigue, elle semble ne pas prendre de parti pris. Mais c’est juste une illusion, car cette caméra fixe nous montre l’innocence de ses deux personnages et nous permet de nous y attacher. Les paysages sont trop grands pour les personnages. Le cadre est de plus en plus oppressant et étouffant. Le film est rempli de métaphores, comme la symbolique de la robe rouge remplacée par une robe noire, pour n’en citer qu’une.
Ce long métrage plein de douceur est le deuxième film kazakh présenté à Cannes cette année. L’autre, Ayka de Serge Dvortevov a fait remporter le prix d’interprétation féminine à l’actrice Samal Yeslyamova.
La lenteur apparente du film n’enlève rien à sa beauté particulière. Telle une peinture ou poésie, le film se savoure.
Voici les cinq premières récompenses du Festival de Cannes avec la sélection Un Certain Regard.
Après environ 2 heures d’attente, en ce vendredi 18 mai 2018, nous avons pu assister à la cérémonie de clôture de la sélection Un Certain Regard qui mettait en avant 18 films, venant de différents horizons.
Le jury est composé de trois femmes et de deux hommes.
Le président du jury, Benicio Del Toro, est un comédien de renommée mondiale. Il est le gagnant du prix de la meilleure interprétation lors du Festival de Cannes 2008 pour sa performance dans Che. Il s’accompagne ensuite de la réalisatrice et scénariste palestinienne, Anne-Marie Jacir. Celle-ci avait quelques années plus tôt été sélectionnée pour présenter son premier long métrage, Le Sel de la Mer. Le réalisateur Kantemir Balagov, qui lui aussi avait été sélectionné l’an dernier pour la compétition Un Certain Regard, avec le long métrage Tesnota. Virginie Ledoyen, actrice depuis sa plus tendre enfance, a joué auprès des plus grands comme Guillaume Canet et Leonardo DiCaprio. Et pour finir, Julie Huntsinger, directrice exécutive du Festival du Film de Telluride, dans le Colorado en Amérique.
Le premier prix attribué est le Prix Spécial du Jury, décerné à Chuva é cantoria na aldeia dos mortosfes (les morts et les autres). C’est un film brésilien de Renée Nadar Messora et Joao Salaviza qui soutient la cause indienne qui se sent oppressée au Brésil.
Le second est celui de la meilleure mise en scène attribuée à Donbass de Sergei Loznitsa, qui a été par ailleurs le film d’ouverture de la compétition Un Certain Regard dans la salle Debussy. Le réalisateur soutient activement un réalisateur actuellement emprisonné, qui a eu le droit à une minute d’applaudissement en hommage à son combat.
Le troisième est le Prix de la Meilleure Interprétation, qui est décerné à Victor Polser dans le film Girl de Lucas Dhont, celui-ci est le plus jeune des lauréats puisqu’il est âgé de 16 ans à peine.
Vient ensuite le Prix du Meilleur Scénario décerné à Sofia de Meryem Benm’Barek, qui présentait son tout premier film. Elle voulait mettre en avant la condition des femmes célibataires enceintes au Maroc.
Pour finir, le Prix d’Un Certain Regard est attribué au film suédois Gräns (Border) d’Ali Abbasi. Il est rediffusé pour la cérémonie de clôture.
Mercredi 16 Mai : Première présentation à Cannes du film Sofia, sélectionné dans la catégorie Un Certain Regard. Toute l’équipe était présente pour nous faire découvrir ce drame franco-marocain, réalisé par la cinéaste Meryem Benm’Barek. Il s’agit du tout premier long métrage de la réalisatrice et son passage à Cannes ne passera pas inaperçu.
Inspiré d’une histoire vraie, le film Sofia immerge le spectateur au cœur d’une famille marocaine résidant dans la ville de Casablanca. Lors d’un repas de famille, Sofia, fille unique, souffre de violentes contractions au niveau de l’abdomen. Accompagnée de sa cousine, Sofia réalise que son accouchement est imminent. Enceinte et non mariée, la jeune femme va devoir se confronter à sa famille ainsi qu’à une société dans laquelle les rapports sexuels hors mariage sont lourdement punis par la loi. Sofia tente alors de retrouver le père de son enfant.
Différents thèmes sont abordés dans le long métrage de Meryem Benm’Barek : la situation des femmes dans le pays, les rapports de classes, les liens familiaux. Le sujet du déni de grossesse, très peu traité au cinéma, est également une thématique soulevée par la cinéaste. Dans le cas de Sofia il est très éclairant sur la pression que les femmes peuvent subir dans cette société. Le film est riche, beau, émouvant. Il donne la parole aux femmes, sans les victimiser. Ce dernier point était essentiel pour la cinéaste qui regrette souvent la représentation victimisée des femmes issues des pays arabes. Le réalisme du film est également soutenu par la très belle performance des acteurs. L’actrice, Maha Alemi, dans le rôle de Sofia, est bouleversante tant son jeu d’acteur est maîtrisé.
Sofia est seulement le deuxième film marocain présenté lors du Festival de Cannes après Much Loved de Nabil Ayouch en 2015. On attend donc avec beaucoup d’impatience les prochaines productions de la réalisatrice.
Vendredi soir, le 23 de mai 2014, le Jury composé par Pablo Trapero, Peter Becker, Maria Bonnevie, Sophie Grassin et Moussa Touré a remis les prix pour la section Un Certain Regard.
Ruben Östlund, réalisateur de Turist (titre français: Force majeure) a remporté le Prix du Jury
David Gulpilil a gagné le Prix de meilleur acteur pour son rôle dans Charlie’s Country (Rolf de Heer)
Samuel Theis, Marie Amachoukeli, Claire Burger (de gauche à droite), les trois réalisateurs de Party Girl ont gagné le Prix d’ensemble
Pablo Trapero, Président du Jury Un Certain Regard
Les autres prix d’ Un Certain Regard :
Prix Un Certain Regard : Fehér Isten réalisé par Kornél Mundruczó
Prix Spécial d’Un Certain Regard : The Salt of the Earth (Le sel de la terre) réalisé par Wim Wender et Juliano Ribeiro Salgado
L’histoire de Wim Wenders et celle du Festival de Cannes sont intimement liées. Alors que l’on fête cette année les 30 ans de la Palme d’or attribuée à Paris, Texas, ce monument du cinéma de la fin du vingtième siècle, alors qu’y ont été présentés des films aussi importants que Les Ailes du désir (1987) ou The end of violence (1997), Wenders revient avec l’assurance de celui qui n’a plus rien à prouver. Dans la sélection « Un certain regard », Le sel de la terre est peut-être le plus beau film du festival 2014.
Quel choc immense que ce Sel de la terre. L’un des rares films à se voir présenté en séance unique, en présence de toute l’équipe (3h de queue pour accéder à la projection), le nouveau film de Wim Wenders est un « documentaire de création », comme Thierry Frémaux l’a présenté en ouverture. Un grand cinéaste filme un grand photographe, et en ressort une réflexion d’une rare acuité sur l’image, sur sa fonction de témoignage, mais aussi sur l’éthique et la mission du témoin. Le film raconte l’itinéraire de Sebastiao Salgado, l’un des meilleurs photographes de notre temps, qui a vécu tous les conflits du monde, s’est lancé dans des reportages au long cours, sur plusieurs années, pour aller chercher la profondeur de l’humain sous les strates de l’anecdote.
Grâce à un dispositif visuel très intelligent, qui permet de superposer à ses propres clichés le visage de Salgado parlant, c’est toute la vie du photographe qui nous est contée. Il ne s’agit pas seulement d’évoquer la vie personnelle du photographe, mais de raconter son rapport au monde, sa relation aux sujets qu’il photographie pour en faire les témoins d’une réalité donnée. Le Sel de la terre est le fruit de deux trajectoires qui se rencontrent : Wenders et Salgado sont liés par un même appétit du monde, une curiosité à toute épreuve, une soif de raconter.
Bien entendu, le film bénéficie de la force esthétique des photos de Sebastiao Salgado, mais il va plus loin : grâce à une narration épurée, une voix off discrète et un montage au cordeau, Wenders parvient à faire surgir l’émotion sans aller la chercher, avec la discrétion et l’élégance qu’il met à s’effacer derrière son sujet, comme Salgado lui-même derrière les hommes et les femmes qu’il photographie. Plus qu’un documentaire, Le Sel de la terre est une leçon d’éthique journalistique, une leçon de cinéma, et pour tout dire une leçon de vie. Le film met en valeur le propos d’une intelligence et d’une sensibilité rares de Salgado, que Wenders ne prolonge pas autrement que par une empathie tout à fait sensible à l’écran.
Le réalisateur allemand s’était déjà illustré dans le genre documentaire, avec Lisbon Story (1994), Buena vista social club (1998) et plus récemment Pina (2011). Il confirme avec Le Sel de la terre que le documentaire est une œuvre, même si celle-ci n’est pas de fiction. Jocelyn Maixent
La projection officielle de Xenia de Panos Koutras, en sélection « Un certain regard », a réveillé le festival en proposant une vraie comédie, à la fois légère et grave, très applaudie par une salle comble. Le cinéma grec a toujours frappé fort lorsqu’il est venu sur la Croisette. Ce pourrait bien être à nouveau le cas avec ce voyage initiatique de deux frères en quête d’un salaud de père.
Dany et Odysseas viennent de perdre leur mère, chanteuse oubliée, et se lancent à la recherche du père qui les a abandonnés lorsqu’ils étaient enfants. Voilà de quoi tisser du mélodrame au kilomètre ! Et pourtant, Xenia est une comédie enlevée, souvent émouvante et parfois très drôle. Ce mélange d’émotion et d’humour kitsch très gay friendly pourrait bien faire de Panos Koutras le Pedro Almodovar grec. Le réalisateur est loin d’être un inconnu. Auteur de la fameuse Attaque de la moussaka géante en 1999, film cultissime de l’esthétique kitsch et de l’absurde, Koutras a déjà interrogé l’identité sexuelle avec Strella (2009), et l’identité tout court : qui sont Odysseas et Dany sans père ? Nés en Grèce de mère albanaise, de quelle nationalité sont-ils ?
La définition de soi sert donc de fil rouge à un voyage initiatique d’Athènes à Thessalonique, où les deux garçons feront quelques rencontres savoureuses (mention spéciale à Angelos Papadimitriou dans le rôle de Tassos), unis par leur amour des chansons italiennes des années 60 dont leur mère les a nourris aussi souvent que de biberons.
Koutras a ceci de commun avec Almodovar que sous les traits de la comédie déjantée se disent des choses graves, le plus souvent en musique et en rythme, grâce à scénario qui ménage peu de pauses au spectateur. Sur l’arrière-fond de la fresque, on trouve la montée de l’extrême-droite grecque, la paupérisation d’Athènes, et l’état d’abandon du pays, dont une très belle séquence donne toute la mesure : Xenia, qui donne son titre au film, est un hôtel abandonné où les deux frères passent une nuit, vestige inquiétant d’un passé radieux où le tourisme faisait vivre le pays.
« Xenos », c’est aussi l’étranger en grec, cet étranger qu’Odysseas et Dany vont chercher, cet étranger qui est en eux et qui se révèlera tout au long du chemin. « Xenia », c’est l’étrangeté, comme celle de ce film déjanté au ton tout à fait unique. Jocelyn Maixent
Ce n’est pas un bon film qui fait l’événement de la sélection « Un certain regard » ce 18 mai, mais une œuvre assez médiocre, Hermosa juventud (La belle jeunesse), de l’espagnol Jaime Rosales. Habitué à filmer l’échec à l’aide d’une esthétique de l’ennui qui atteint assez efficacement son but il faut bien le dire, Rosales s’attache ici à un jeune couple aux maigres ressources dans une Espagne en crise. Ambiance.
Sans perspectives, sans formation et sans travail, Natalia et Carlos ont 22 et 23 ans. Dans une Madrid triste à mourir (à croire que le soleil a à tout jamais déserté l’Espagne), les deux amoureux ne parviennent pas à s’en sortir, en vivotant chez leurs parents et en gagnant quelques euros sur les chantiers. Lorsque Natalia apprend qu’elle est enceinte, c’est une déflagration : l’arrivée du bébé risque de précipiter la chute du couple.
On se prend à rêver de ce qu’un cinéaste un peu formaliste, un peu brillant, aurait pu faire de cette atmosphère de loose intégrale, métaphore d’une jeunesse européenne qui subit la crise depuis 2008. Ce rêve, hélas, ne devient pas réalité : la réalisation est assez plate, les plans peu inventifs et souvent trop longs. Bref, pas grand chose à se mettre sous la dent.
La bande-annonce de Hermosa Juventud (Jaime Rosales)
En espagnol sous-titrée en anglais
Pourtant, deux séquences retiennent l’attention et sortent le spectateur à bout de force de sa léthargie. Deux séquences où l’écran de cinéma épouse les contours de celui d’un smartphone. Rien que pour ces deux moments, Hermosa juventud mérite l’intérêt : Rosales utilise très intelligemment les ressources de l’outil pour créer des rapprochements, des effets de sens, pour enjamber des ellipses et faire bifurquer son récit avec un art du raccourci extrêmement efficace. Ainsi, la naissance et les premiers mois de l’enfant sont racontés à travers un entremêlement de photos et de messages échangés ; ainsi, le séjour de Natalia en Allemagne, et la fin de ses illusions nous sont montrés de la même manière, légère, rapide et fine.
Cet îlot de réussite dans un film par ailleurs assez moyen fait question. Si l’œuvre nous paraît à ce point ennuyeuse alors que ces deux séquences déclenchent l’enthousiasme, est-ce l’indice d’un changement irréversible de notre propre regard ? Notre regard contemporain est-il désormais en phase avec l’impératif de vitesse et l’information multimodale incarnés par les smartphones, au point de ringardiser à ce point une narration classique ? On en vient à craindre que, sans le savoir peut-être, Rosales se soit tiré une balle dans le pied. Car réussir à ce point ces deux séquences, ce n’est peut-être pas une bonne nouvelle pour le cinéma. C’est en tout cas une sacrée remise en question de ses modes de narration. Jocelyn Maixent
Le premier grand choc de la sélection Un certain regard vient de Hongrie. Déjà en sélection officielle pour Delta en 2008, Kornel Mundruczo, qui s’était fait connaître en 2005 avec Johanna, une comédie musicale expressionniste, livre un film hallucinant de rigueur au service d’une fable fantastique où les chiens aboient.
Si Cannes est le plus grand festival de cinéma au monde, c’est parce qu’il a su garder dans ses sélections un certain goût de l’audace. Et l’audace, Feher Isten (White god) n’en manque pas. Quand le festivalier tout fraîchement débarqué de son TGV commence son marathon cannois par un OVNI pareil, il peut avoir confiance dans la capacité du cinéma à se réinventer.
Lili a 13 ans et un bon gros chien-chien. On pourrait presque croire à un teen movie coupé de Lassie chien fidèle. Fausse piste. Car c’est un conte visionnaire très ambitieux que déploie Kornel Mundruczo en réussissant à faire d’un chien, Hagen, un personnage pivot du récit. Dans ce pays imaginaire où seuls les chiens de race ont droit de cité et où les « bâtards » sont bannis (rien à voir avec la Hongrie fascisante de ces dernières années), Hagen rejoint une bande de chiens errants bien décidés à faire périr les hommes sous leurs crocs. La guerre est déclarée entre l’humanité et les chiens…
La bande-annonce de White Dog (uniquement en VO pour le moment)
Ce scénario à peine vendable à un producteur normalement constitué, Mundruczo en fait d’abord une séquence d’ouverture incroyable, d’une originalité et d’une force visuelle rares. Puis, au fur et à mesure que se déploie le film, dans une mise en scène plus que maîtrisée, la lente dérive vers l’impensable se produit : le réalisateur réussit ainsi le tour de force de marier une atmosphère fantastique et une crédibilité sans faille de la narration, faisant culminer ce mariage a priori contre nature dans une dernière demi-heure carrément flippante qui scotche le spectateur à son fauteuil en l’interrogeant sur la civilisation, le rapport de l’homme à l’animal et la force de l’enfance.
Un très grand film, porté par une photo impeccable et une ambiance crépusculaire. A la sortie de la salle, retrouver le soleil chaud et l’atmosphère du festival est presque improbable. Feher Isten réussit sa mission : on en vient à douter de la limite entre fiction et réalité. Ici, là, au coin de la rue, partout, les chiens attendent. Jusqu’au jour…
Le président du Jury Un certain regard de la 67ème édition du Festival de Cannes est le réalisateur et scénariste argentin Pablo Trapero.
L’élection de Trapero pour ce poste signifie une évolution dans l’aventure cannoise du scénariste argentin, laquelle a commencé en 2002 avec la sélection de son film El bonaerense pour la compétition Un certain regard. Avec Carancho en 2010 et Elefante Blanco en 2012, Pablo Trapero a concouru dans la même compétition que celle pour laquelle il est Président du Jury cette année.
Des films qui montrent des problèmes sociaux, des injustices, qui parlent de drogues, de corruption, et d’insécurité. Enfin, il use du drame avec de personnages communs. Telle est la marque Trapero, une marque toujours en mutation et en exploration.
« Je suis enthousiasmé, ce n’est pas une année comme les autres, il y a des expectatives dans l’ensemble de la sélection », a-t-il déclaré il y a quelques jours au journal argentin Clarín. Pour le scénariste, cette sélection est toujours passionnante, « on y trouve de grands maîtres, de jeunes promesses, les nouveaux pays et les formes nouvelles du cinéma ».
Curiosité : au début de sa carrière cinématographique, Pablo Trapero co-produit La libertad (2001), de Lisandro Alonso, metteur en scène aussi argentin dont le film Jauja est cette année en compétition pour Un certain regard.